#NuitDebout, En Marche ! et les Panama Papers
Parfois l’actualité nous
offre des télescopages surprenants et instructifs; ainsi au moment où le
phénomène Nuit Debout semble s’ancrer
dans le paysage de l’actualité, Emmanuel Macron lançait son propre
« mouvement » sous l’appellation En Marche ! et les Panama
Papers étaient révélés par plus d’une centaine de journaux.
Tour d’abord de façon
ironique on peut noter que « En Marche ! » se définit comme un
« collectif citoyen », feignant ainsi d’utiliser les codes et le
vocabulaire des mouvements issus hors des partis qui ont essaimé depuis une
dizaine d’années, d’Occupy Wall Street
aux Indignados.
Or nous sommes bien en
présence de deux mondes qui en fait s’ignorent : Emmanuel Macron continue
de faire de la politique à l’ancienne, espérant créer les bases d’une force qui
pourra les soutenir dans sa quête du pouvoir. En Marche !, qui utilise
d’ailleurs les initiales de Macron dans un logique de fan club transparente,
n’est qu’un instrument au service d’une ambition présidentielle (j’ai déjà dit
par ailleurs sur ce même blog
à quel point Macron n’était porteur d’aucune nouveauté en matière de programme,
son slogan « ni à droite, ni à gauche » matérialisant le recyclage de
vieilles
idées politiques). En Marche ! incarne, en tout cas à ce stade, justement tout ce dont les mouvements citoyens
ne veulent plus : vision pyramidale de la société, culte de la
personnalité, inscription dans un cadre institutionnel verrouillé..
Nuit Debout apparaît en
revanche comme un objet inclassable, regroupant des voix disparates et
anonymes, abordant des sujets très variés et parfois sans grande cohérence et
proposant des solutions dans un foisonnement revigorant. La prise de parole par
tous semble presque plus importante que la possibilité de mettre en œuvre de
vraies pratiques, de vraies politiques. Etre ensemble, y compris dans la
dimension physique de l’occupation de places, étant finalement une fin en soi –
et c’est déjà beaucoup. On sourit d’ailleurs quand on lit le programme des
manifestations où l’Assemblée Citoyenne côtoie le Karnaval, et le Jardin
des Savoirs croise la Commission Grève Générale, dans une explosion linguistique
très XXème siècle. On sourit avec bienveillance et on se demande d’ailleurs ce
qui pourra finalement en « sortir » car la dynamique actuelle de Nuit
Debout, c’est à dire une forme de désorganisation voulue, porte en elle ses
propres limites. A ce jour je serai par exemple bien en peine de citer une
proposition « définitive » issue du mouvement.
Il faut sans doute un cadre
pour informer – c’est à dire donner une forme – au mouvement et lui permettre
de déboucher sur une logique d’action qui transforme la société. Ce sera la
problématique des prochaines semaines et des prochains mois pour savoir si Nuit
Debout peut devenir un réel « acteur » de transformation du paysage
politique et social français.
C’est un enjeu majeur, comme
toutes les initiatives qui visent à transformer profondément notre société, car
la parution cette semaine des Panama Papers – et
évidemment il y aurait matière à des Bahamas Papers ou des Caiman Papers qui
seraient d’une ampleur équivalente - montre à quel point , à ceux qui en
douteraient encore, que le système économique financier international est
devenu un système prédateur – le captalisme
– au service d’une ploutocratie
mondiale. Le changement n’est plus une option.
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