Régionalisation du SMIC (et du RSA ?)
Constat
L'indice des Prix à la
Consommation (IPC) est un très bon indice macro-économique et la France
peut s’enorgueillir d'avoir une administration performante (efficiente je ne
sais... ) avec L'INSEE.
Ceci étant, il y a une
méfiance croissante de la population a l'égard de cette indice pour les raisons
suivantes :
- il se réfère à un français moyen qui par définition n'existe pas : c’est le grief le plus souvent présent dans les médias. L’INSEE affiche depuis plusieurs années une inflation quasi-nulle lors même que l’ »inflation ressentie » est positive. C’est une limite quasi consubstantielle à l’indice.
- l'intégration des performances fait qu'un smartphone vendu 500€ en 2016 et en 2017 se verra attribuer une déflation de mettons 5% vu l'augmentation de ses capacités techniques. C'est méthodologiquement juste mais pas évident à intégrer puisque bien souvent, l'ancien smartphone n'est plus vendu
- le poids du logement qui
est le plus gros problème pour le pouvoir d'achat. La composition du panier de
calcul de L’IPC n’est pas publique pour éviter les manipulations mais il est
facile de le retrouver sur le site même de L’INSEE (…)
Le pourcentage de la consommation dédié au logement serait de 6.1%
ce qui très bas quand on constate des taux d’effort de 40% à Paris (et une
moyenne française autour de 22 à 23%).
Mécaniquement, le fait qu’un peu plus de la moitié des français soient
propriétaires divise par un peu plus 2 le % du panier INSEE consacré au
logement. Si ajoute ensuite la grande hétérogénéité des loyers selon les villes
et l’influence du parc social. Mais, surtout, les remboursements d’emprunt ne
sont pas comptés dans le panier puisqu’ils font partie de l’épargne et non de
la consommation au sens INSEE.
En bref, l’inflation
sous-estime d’un facteur 3 à 4 la part du logement dans les dépenses des ménages
alors même que c’est ce qui pèse le plus sur le pouvoir d’achat.
- les
paniers et prix sont très différents entre Paris et Province. Ainsi, un rural
brûlera plus de gazole mais bénéficiera d'un logement moins cher. La différence
intra-provenciale est également importante même au sein d’une région (Rhône-Alpes
Auvergne par exemple) ou même à l’échelle du département (entre les métropoles
régionales comme Clermont-Ferrand et les zones rurales du Puy-de-Dôme).
En
résumé, le constat est le suivant :
- - Un problème de LISIBILITÉ pour les français dû principalement
à la sous-estimation drastique du poids du logement
- - Le pilotage macro-économique se base sur un agrégat qui masque la diversité des
situations individuelles et des territoires ce qui conduit à un pilotage trop
« grossier »
Globalement,
le gros problème est qu'on peut vivre "correctement" d'un SMIC à
Guéret mais pas à Paris.
Proposition
de création d’un ICV avec description de son contenu
Il ne s’agit en aucun cas de
modifier L’IPC, celui-ci répondant à des normes internationales et
européennes (EUROSTAT), mais de le
compléter par un indice – L’indice du
Coût de la Vie (ICV) – qui
vienne corriger les défauts constatés au chapitre précédent.
L’idée est d’éclater L’IPC selon
deux axes : géographique et situation de logement (propriétaire de « plein droit » et
locataires ou propriétaire remboursant son emprunt). Par ailleurs, on peut ici
se débarrasser de deux contraintes méthodologiques :
- - L’intégration des performances : un accès
Internet à 29.99€ passant de 2 mbps à 5 mbps affichera une inflation nulle et
non négative
- - Les remboursements d’emprunt logement seront
intégrés à la consommation
Pour la géographie, l’idée est de
découper en zones (3 à 5) qui
regrouperaient des entités manipulées par L’INSEE. Les zones d’emploi sont un bon candidat (329) mais font l’impasse entre le centre des
métropoles (mêmes petites), les zones
péri-urbaines, rurbaines et enfin rurales. Or cette distinction est capitale
pour atteindre l’objectif porté par cette proposition. Il faudra donc mixer les
zones d’emploi et les communes ce qui demandera un haut degré de
numérisation (croisement de fichiers de
différentes sources, push d’information depuis des sources locales) et un bon
calibrage.
L’objectif serait d’arriver au
tableau suivant avec un rafraîchissement annuel seulement (nécessaire et suffisant) :
Avec par exemple :
- - Zone 1 : Paris intra-muros
- - Zone 2 : Paris 1ere couronne + grandes
agglos régionales intra-muros + Côte d’Azur + Pays de Gex
-- Zone 3 : Paris 2nde couronne +
grandes agglos régionales 1ere couronne + petites agglos régionales centre
- - Zone 4 : Rurbain
- - Zone 5 : rural
Le résultat est un indice base
100 ou l’on prend conventionnellement 100 en année 1 pour zone 3 / locataires. L’indice
ICV global est la moyenne des ICV de chaque zone pondérés par leur poids. L’indice
composite par zone, dont nous verrons l’utilité par la suite, est la moyenne
pondérée des 2 ICV de la zone pondérée par le ratio locataires / propriétaires.
D’un point de vue méthodologique,
il faut se poser la question de la composition du panier. En effet, un rural va
avoir un % de carburant plus élevé qu’un parisien. Par contre, un parisien aura
un % plus élevé de spectacles/divertissements/voyages. Si le carburant est une
dépense contrainte, ça n’est pas le cas des voyages ou spectacles. Il faudra
donc neutraliser certains postes pour avoir un indice qui soit le plus possible
« à vie égale « . Il est illusoire d’y arriver totalement ne
serait-ce que par la consommation « non marchande » (que vaut le fait
de vivre dans un environnement peu pollué avec vue sur les Alpes ?).
Application
de l’ICV au SMIC et aux prestations sociales
Jusque là, nous sommes en mesure
d’offrir aux citoyens un modèle du Coût de la Vie qui réponde mieux à son
ressenti. C’est bien mais largement trop peu.
Revenons à une phrase citée dans
le Constat : « on ne vit pas la même façon avec un SMIC à Guéret qu’à
Paris ». On peut voir cette phrase sous deux angles :
- - La montée des travailleurs pauvres notamment à Paris
- - Une fracture territoriale que la crise a
renforcée et la zone que Christophe Guilly appelle la France Périphérique celle du peri-urbain, des petites villes de
Province (Guéret) ou les vastes
territoires desindustrialisés. Cette France des « perdants de la
mondialisation » est marquée par un fort taux de chômage et de vote FN.
L’idée serait donc de moduler le
SMIC par zone en fonction de l’indice composite de la zone. On aurait ainsi (cf
tableau exemple) SMIC ZONE 1 = ICV Composite ZONE 1 / ICV Composite global =
SMIC x 129 / 95 = SMIC + 36%. Évidemment , et cet exemple le montre, il n’est
pas possible de répercuter de telles variations. Il paraît raisonnable
d’appliquer un maximum de 10% en valeur absolue. La formule devrait donc être
aménagée pour lisser et caper le passage de L’ICV au SMIC de zone.
Notons que L’indice s’applique au
lieu de travail et non de résidence du salarié. Il ne serait pas raisonnable de
faire cohabiter plusieurs SMIC dans la même entreprise et cela pourrait
déboucher sur des pratiques discriminatoires à l’embauche.
Quel serait l’effet d’un
relèvement du SMIC à Paris intra-muros ou en 1ere couronne ? On peut
craindre des pertes d’emplois par effet d’éviction. Or, la plupart des salariés
au SMIC ou proche de celui-ci travaillant à Paris intra-muros ont des emplois non-délocalisables
(même en Province) : hôtellerie / restauration, services de nettoyage ou encore
fonctionnaires catégorie C de la Ville de Paris. Paris a également et de loin
la plus forte densité de cadres et également de haut revenus en France, ayant
la capacité d’absorber quelques % de hausse sur un repas ou sur les impôts
locaux. De même, une hausse de quelques % des services de nettoyage ne remet
pas en cause la rentabilité des grandes entreprises basées à Paris. On peut
également craindre une spirale inflationniste à Paris : L’ICV fait monter
le SMIC qui fait montre l’ICV etc C’est là aussi très peu probable vu le faible
% de petits salaires à Paris, la très faible probabilité d’escalade
prix/salaires et les tensions déflationnistes actuelles. L’effet vertueux par
contre obtenu est celui d’une réduction
des travailleurs pauvres à Paris.
L’effet pour la Province est, par
cercles concentriques avec un effet maximal vers la France Périphérique, une
désinflation compétitive ou encore une
« mini-devaluation » vis-à-vis de Paris et des grandes métropoles
qui peut permettre une délocalisation de certains emplois industriels ou
tertiaires (centre d’appels) vers des territoires sinistrés qui n’ont presque
plus que de l’emploi public et les services tertiaires qui leur sont liés.
L’effet est donc une redynamisation de
la France Périphérique.
Évidemment la mise en œuvre pose
problème. La hausse du SMIC dans certaines zones rencontrera, outre
l’opposition du MEDEF, celle des syndicats de certains secteurs (hôtellerie /
restauration). Une baisse de plusieurs % du SMIC à d’autres endroits risque de
se heurter à de farouches résistances. Il faut d’abord noter que cette baisse
ne touchera que les nouvelles embauches (avec toutefois un impact quasi-immédiat sur
les CDD et intérimaires). Il y a plusieurs solutions envisageables (qui peuvent être panachées) :
- - Mise en œuvre progressive (au risque de diluer
l’effet)
- - Compensation temporaire par l’Etat (crédit d’impôt) pendant une durée limitée
pour les salariés visés
- - Mise en œuvre des baisses uniquement lors
d’accord de branches ou d'entreprises avec définition des modalités (étalement. …) à ce niveau.
Il est également possible
d’utiliser le même mécanisme pour certaines prestations sociales (RSA, …). Le mécanisme serait globalement le
même sauf que cette fois c’est le lieu de domicile qui serait rapporté au
zonage et non le lieu de travail.
Par ailleurs, dans ce cas, ce ne
sera pas l’indice ICV composite qui serait utilisé mais celui locataires/propriétaires
en cours de remboursement ou propriétaires de « plein droit ». Il
paraît en effet logique de moins verser à un ménage propriétaire de son
logement qu’à un ménage consacrant 30% de ses revenus au logement.
Cette différentiation spatiale et
selon le statut de logement est à examiner en profondeur pour éviter une
censure du Conseil Constitutionnel.
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